L’atteinte des objectifs ambitieux de réduire au Québec, d’ici à 2020, les émissions de gaz à effet de serre (GES) à un niveau de 20% inférieur à celui enregistré en 1990 passe par l’application d’une série de différentes mesures. L’accroissement du parc automobile à propulsion électrique est sans équivoque l’une de ces mesures les plus intéressantes au niveau de l’efficacité à réduire les GES. L’application à grande échelle des véhicules électriques se heurte présentement à un défi    scientifique et technologique de taille, à savoir le développement de batteries plus efficaces, peu dispendieuses et surtout sécuritaires. Les systèmes de batteries au lithium-ion (BLI) actuellement sur le marché ne peuvent satisfaire aux critères requis pour une application en véhicules électriques à cause de problèmes de sécurité à haut voltage nécessitant l’ajout de systèmes complexes et couteux de régulation empêchant la surcharge et la surdécharge. La recherche sur le domaine aux cours des dernières années a permis la découverte de plusieurs matériaux d’électrode tels que LiMn2O4 et LiFePO4, permettant d’augmenter la quantité de charge stockée et d’accroître le voltage des BLI, mais sans toutefois enrayer efficacement  les problèmes de stabilité lors de charge et décharge intensives pouvant mener à l’explosion des dispositifs. Le développement de nouveaux systèmes électrolytiques permettant une opération sécuritaire à haut voltage des batteries est ainsi un point critique requis pour l’application de ces matériaux hautement performants. Dans cette optique, nous avons réalisé un projet de recherche portant sur l’utilisation de liquides ioniques en tant qu’électrolyte en BLI spécifiquement dédiées aux véhicules électriques. Ces liquides ioniques sont des milieux liquides composés entièrement d’ions qui possèdent une excellente stabilité thermique et électrochimique.

Une première approche suivie a consisté en l’étude de la stabilité thermique des matériaux cathodiques de nouvelle génération en présence liquides ioniques électrochimiquement stables à potentiel élevé. La grande stabilité thermique des liquides ioniques, couplée à leur ininflammabilité permettra le développement d’électrolytes plus sécuritaires à haut voltage. Pour mieux comprendre les principes responsables de cette stabilité, nous avons étudié le comportement thermique des matériaux couramment utilisés dans les batteries en présence d’électrolytes à base de liquides ioniques. La technique de calorimétrie accélérée a permis de démontrer que la température à laquelle survient la dégradation de l’électrolyte et du matériau d’électrode (c’est-à-dire à laquelle le système peut s’enflammer et exploser) était supérieure de 150°C supérieure grâce à l’ajout de liquide ionique. De plus, l’énergie dégagée lors de la combustion est moindre en présence de liquide ionique par rapport aux électrolytes conventionnels, ce qui démontre l’effet bénéfique du liquide ionique sur la stabilité et donc sur la sécurité des batteries à ions lithium.

Notre deuxième approche visait à modifier la structure de liquides ioniques basés sur des imidazoles par des groupements électroactifs. Ces groupements électroactifs agiront comme navettes d’électrons entre les électrodes de la pile et de prévenir  la surcharge et surdécharge. Nous avons démontré pour la toute première fois, au cours de projet, que l’utilisation d’un électrolyte intrinsèquement électroactif permet d’abolir les limites de solubilité des navettes actuellement utilisée comme méthode d’autorégulation de la charge. Une demande de brevet provisoire fut déposée en avril 2012, suivi par le dépôt d’une demande complète en mars 2013 sur cette découverte. Un démarchage auprès d’éventuels partenaires industriels est présentement en cours. Les travaux réalisés en relation avec cette deuxième approche ont été tout d’abord centrés sur le design et la synthèse de nouveaux liquides ioniques électroactifs puisque qu’il n’y a que très peu d’exemples de ces espèces dans la littérature. Nous avons innové notamment par la synthèse de liquides ioniques électroactifs (LIÉ) utilisant un groupement rédox organique ainsi que par la modification de l’anion du liquide ionique par un groupement rédox. Un effort significatif a dû être déployé pour la synthèse de ces nouvelles molécules et nous avons pu rapporter ces synthèses dans des articles et lors de conférences. Les nouveaux liquides ioniques électroactifs ont également été étudiés dans des cellules représentant des batteries à ions lithium afin d’évaluer leur comportement dans des systèmes près de ceux retrouvés dans les systèmes commerciaux. Nous avons de cette manière démontré que les LIÉ peuvent être utilisés en solution dans les solvants typiques de batteries lithium et qu’ils sont efficaces pour protéger la cathode contre la surchage. Nous avons démontré qu’il est possible de modifier la nature du groupement électroactif sur le liquide ionique afin d’ajuster le potentiel d’oxydation et ainsi les appliquer spécifiquement à un type de matériau de batterie. Les derniers résultats obtenus dans cette partie du projet ont notamment démontré de façon éloquente que ces liquides ioniques peuvent être utilisés avec le phosphate de fer (LiFePO4), qui est un des matériaux composant les cathodes présentement sur le marché. La réalisation la plus marquante de ce projet est toutefois la démonstration que l’utilisation des liquides ioniques électroactifs permet d’atteindre des concentrations en navette rédox jusqu’à 1 M, ce qui représente une augmentation par un facteur de 10 la concentration maximale présentement possible avec les navettes rédox connues. Cette augmentation se traduit par une protection accrue de la cathode lors des charges et décharges à haut régimes qui est nécessaire pour le stockage rapide des batteries et l’application en véhicules électriques des systèmes de haute puissance.

L’avancement des connaissances réalisé lors de ce projet aura des retombées sur l’application à grande échelle des véhicules électrique. De plus, la formation de chercheurs spécialisés dans le domaine du stockage d’énergie par les systèmes BLI lors de ce projet contribuera à répondre aux besoins actuels et futurs de la province de Québec de main d’oeuvre hautement qualifié dans ce domaine.

Chercheur responsable

Dean MacNeil, Université de Montréal

Équipe de recherche

  • Dominic Rochefort, Université de Montréal

Durée

2010-2013

Montant

250 000 $

Partenaires financiers

  • Fonds québécois de la recherche sur la société et la culture
  • Ministère du Développement économique, de l’Innovation et de l’Exportation

Appel de propositions

Réduction et séquestration des gaz à effet de serre