Ce projet interdisciplinaire a été initié et dirigé par Michèle Heitz (Génie chimique et génie biotechnologique (GCGB)) à l’Université de Sherbrooke. Y ont collaboré les professeurs, Nathalie Faucheux (GCGB), Josiane Nikiema (GCGB) (2010-2011), Ryszard Brzezinski (Biologie), Réjean Tremblay (Biologie, Université du Québec à Rimouski) et Jean-Sébastien Deschênes (Génie, UQAR). Par ailleurs, une collaboratrice internationale Anne Giroir Fendler, Université de Lyon 1 (ULyon 1), France, est intervenue dans ce projet.

Problématique

Depuis la fin des années 1970, plusieurs crises pétrolières ont engendré une hausse importante du coût des carburants d’origine fossile, reconnus comme étant une des sources majeures de dioxyde de carbone (CO2), un gaz à effet de serre (GES) particulièrement nocif pour notre environnement. Par ailleurs, l’épuisement anticipé du pétrole, d’ici 2050, rend indispensable le développement de nouveaux carburants moins polluants et capables de remplacer, en partie ou en totalité, ceux d’origine fossile. Un produit de remplacement au diesel est le biodiesel, produit habituellement par transestérification des huiles issues de graines oléagineuses ou de graisses animales. Notre projet propose une solution alternative pour l’obtention du biodiesel à partir de microalgues. Cette biomasse constitue la seule source reconnue capable de remplacer le diesel d’origine fossile. Ces microalgues croissent rapidement (temps de doublement de moins de 24 h) et ont un rendement à l’hectare 30 fois supérieur aux oléagineux terrestres.

Dans notre projet, les triglycérides (TG) contenus dans les microalgues ont été extraits et transformés en biodiesel à l’aide d’un procédé de transestérification chimique par catalyses homogène et hétérogène. L’utilisation de catalyseurs hétérogènes chimiques est une approche originale pour le traitement des TG issus des microalgues, qui seront cultivées en bioréacteurs à l’échelle laboratoire. Contrairement à la production de biodiesel à partir de graines oléagineuses, notre projet Phytodiesel, en utilisant des microalgues, n’appauvrit pas les ressources arables et forestières et ne détournera pas les terres destinées à l’alimentation.

Objectifs

Le principal objectif de ce projet était de produire du biodiesel à partir de microalgues. Les conditions opératoires de production du biodiesel reliées à la croissance des microalgues, à la production de triglycérides (TG), à l’extraction de l’huile et à son traitement subséquent par une réaction de transestérification chimique homogène ou hétérogène ont été optimisés ou en voie d’être optimisés.

Nos objectifs spécifiques sont : augmentation du contenu en TG des microalgues et extraction de l’huile; réaction de transestérification par voie chimique de l’huile extraite des microalgues; et caractérisation des TG et du biodiesel.

Résultats

Volet 1 : Les microalgues grâce au mode de culture sélectionnée contiennent quatre fois plus de TG et sont cinq fois plus productives en biomasse. Nous avons identifié une espèce de Scenedesmus capable d’utiliser une source de carbone considérée comme un rejet de l’industrie agroalimentaire, soit le lactosérum. Nous avons démontré que dans des conditions de mixotrophie (culture sous lumière en présence de lactosérum), la productivité était cinq fois plus importante qu’en autotrophie classique (lumière) et 30% plus grande qu’en hétérotrophie (lactosérum sans lumière). De plus, suite à l’obtention de la productivité maximale, nous avons démontré que l’application de stress nutritionnel peut accroître substantiellement la quantité de TG dans les cultures. Nous avons obtenu des teneurs jusqu’à cinq fois plus importantes avec l’implantation de stress.

Volet 2 : Dans un 1er temps, plusieurs méthodes physico-chimiques d’extraction ont été comparées afin d’augmenter le rendement en lipides extraits des micro-algues.

Dans un deuxième temps, les paramètres de la réaction de transéstérification par voie chimique homogène ont été optimisés; un procédé en deux étapes (milieu basique suivi d’un milieu acide) s’est révélé le plus adéquat et a permis d’obtenir un biodiesel d’une pureté >75% (w/w) et un rendement en esters méthyliques d’acides gras (EMAG) >30% g EMAG/lipides. De plus, les composés (lipides) ne pouvant pas servir à la production de biodiesel (insaponifiables) ont été isolés. Afin de réaliser une transestérification par voie chimique hétérogène, divers catalyseurs ont été synthétisés et caractérisés à l’Université Claude Bernard Lyon 1 (UCBL) de Lyon 1 (France). Ces derniers sont présentement en voie d’utilisation.

Volet 3 : La caractérisation des TG et du biodiesel effectuée dans ce volet a permis de vérifier la qualité du biodiesel produit. Les résultats obtenus ont été diffusés auprès des industriels dans le cadre de deux ateliers organisés par le CRIBIQ, Sherbrooke, 2012 et dans le cadre de l’Acfas, Sherbrooke, 2011 et auprès des scientifiques dans des revues et conférences internationales (un article accepté, trois articles soumis et dix compte-rendus (dont un soumis), huit conférences et quatre affiches).

Retombées escomptées

Les bénéfices potentiels de notre projet pour le Québec se situent à 5 niveaux :

a) Fondamental : Nos recherches ont permis d’acquérir une meilleure compréhension de l’influence des nutriments et donc des voies métaboliques impliquées dans la production des lipides à partir des microalgues et une meilleure connaissance des procédés de transformation de biomasse aquatique en biodiesel.

b) Énergétique : Afin de pallier à la disparition anticipée de l’énergie d’origine fossile et de diversifier les sources d’approvisionnement, nos recherches ont permis le développement de biodiesel, une source de carburant de remplacement.

c) Environnement et qualité de vie de la population : Notre projet propose une alternative innovante au Québec, basée sur l’utilisation de microalgues. La production de biodiesel à partir de microalgues à l’échelle industrielle n’affecterait pas la production céréalière et ne monopoliserait pas des terres agricoles à des fins non alimentaires.

d) Économique : Notre procédé diminuera les besoins en importation de pétrole brut et permettra la création de nouveaux emplois.

e) Formation de personnel hautement qualifié : Ce projet interdisciplinaire a formé des PHQ polyvalents et ayant une connaissance solide en biologie et en génie chimique et génie biotechnologique.

Chercheure responsable

Michèle Heitz, Université de Sherbrooke

Équipe de recherche

  • Ryszard Brzezinski, Université de Sherbrooke
  • Jean-Sébastien Deschênes, Université du Québec à Rimouski
  • Nathalie Faucheux, Université de Sherbrooke
  • Sompassaté Josiane Nikiema, Université du Québec à Rimouski
  • Réjean Tremblay, Université du Québec à Rimouski

Durée

2010-2013

Montant

250 000 $

Partenaires financiers

  • Fonds québécois de la recherche sur la société et la culture
  • Ministère du Développement économique, de l’Innovation et de l’Exportation

Appel de propositions

Réduction et séquestration des gaz à effet de serre