Responsable : 
Maude Flamand-Hubert

Établissement : 
Université Laval

Année de concours : 
2020-2021

Table des matières

  1. Résumé du projet

1. Résumé du projet

Ce projet de recherche a pour objectif de saisir le processus de formation des forêts privées québécoises, ainsi qu’à comprendre le rôle sociohistorique joué par celles-ci dans l’articulation entre les politiques publiques et l’organisation territoriale et régionale. Jusqu’à maintenant, le rôle des forêts privées a été occulté au profit de l’étude de l’exploitation forestière menée sur le domaine public. La dimension privée de l’appropriation du territoire forestier a par conséquent été minorée, bien que, dès le début du 20e siècle, les gestionnaires aient relevé le problème que pose l’arrimage entre la forêt publique et les forêts privées. Le problème est à la fois d’ordre social, économique et écologique, puisque ces forêts, tout en présentant une grande diversité, appartiennent à un même ensemble naturel et qu’elles sont complémentaires du point de vue de l’approvisionnement des marchés et de la vitalité des collectivités. Qui plus est, puisqu’elles sont intimement associées au processus de peuplement du territoire, les forêts privées se distinguent des forêts publiques par leur localisation à proximité des centres de population, des réseaux de transport et des marchés.

Le retour aux fondements sociohistoriques de l’appropriation des espaces forestiers de 1830 à 1940, dans leur association à la colonisation agricole et à l’émergence des politiques forestières, est devenu nécessaire afin d’éclairer notre compréhension de certains phénomènes contemporains. En effet, les différentes expériences humaines et juridiques d’appropriation et d’exploitation héritées du passé ont fait des forêts privées un environnement à la fois naturel et social complexe. D’une part, les terres sous tenure privée ont été concédées en vertu de modèles juridiques variés – soit au sein du régime seigneurial ou du régime cantonal – qui imposaient des contraintes à l’exploitation des bois. D’autre part, l’utilisation des forêts privées était subordonnée aux essences forestières disponibles.

En suivant la trajectoire de trois régions fortement marquées par l’exploitation forestière entre 1830 et 1940 (Outaouais, Cantons-de-l’Est, Bas-Saint-Laurent), nous comparerons les différents modes d’appropriation foncière et d’exploitation des ressources forestières à travers le temps et l’espace. Selon les périodes, les forêts publiques ont approvisionné les marchés internationaux en bois équarris, pour le sciage ou les pâtes et papiers. La contribution des forêts sous tenure privée à l’économie régionale demeure quant à elle méconnue, bien que plusieurs indices révèlent leur importance pour approvisionner les marchés locaux, soit en bois de sciage ou de chauffage, ainsi que leur contribution à la production de paysages sociaux et écologiques diversifiés.

Cette recherche permettra ainsi de mettre en lumière l’articulation entre deux composantes fondamentales de la dynamique politique et territoriale québécoise, soit 1) le défi qu’ont posé au cours de l’histoire les relations entre le s stratégies individuelles d’exploitation et la régulation collective des ressources et leurs conséquences sur les politiques nationales de gestion des ressources ; 2) la diversité et la richesse des interactions vécues par les populations au contact des forêts sous tenure privée tout au long de l’histoire, et comment les espaces forestiers sous tenure privée ont contribué à structurer les économies régionales et à forger l’identité des régions rurales.