Responsable :
Roxanne Lemieux
Établissement :
Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR)
Année de concours :
2020-2021
Table des matières
1. Résumé du projet
L’exposition à de la maltraitance durant l’enfance est un enjeu de santé publique majeur : elle touche environ le tiers de la population (Berthelot et al., sous presse) et est liée à l’émergence de problèmes de santé mentale et physique (Afifi, 2011). Cette problématique a également des impacts intergénérationnels, puisque les enfants de parents ayant vécu des abus ou de la négligence peuvent aussi être affectés par cette maltraitance. D’une part, ils sont trois fois plus à risque d’être maltraités à leur tour que les enfants dont les parents n’ont pas d’antécédent de mauvais traitements (Assink et al.,2018). D’autre part, même en l’absence de répétition des mauvais traitements, ces enfants sont plus susceptibles de développer une variété de difficultés interpersonnelles, affectives, comportementales et neurobiologiques (Lemieux et al., accepté). Ces éléments sont alarmants puisqu’une récente étude montre que les interventions existantes visant à prévenir la maltraitance durant l’enfance s’avèrent peu efficaces (Viswanathan et al., 2018).
Dans le domaine de la recherche sur l’attachement, une hypothèse parmi les plus citées stipule que l’effet des sentiments de peur reliés aux mauvais traitements vécus durant l’enfance peut persister à l’âge adulte chez des mères et que ces sentiments peuvent se transmettre via les interactions mère-enfant (Hesse et Main, 1990). Lorsqu’elles interagissaient avec leur enfant, ces mères ont tendance à adopter des comportements apeurés (ex. ne pas offrir de réconfort à l’enfant lorsqu’il pleure) et effrayants (ex. se montrer hostile) (Lyons-Ruth et Block, 1996). Les enfants exposés à ces comportements parentaux lors de la petite-enfance présenteraient des problèmes sociaux à l’âge scolaire, ainsi que des comportements de consommation abusive et d’importantes difficultés à réguler leurs émotions, une fois adultes (Lyons-Ruth et al., 2013).
À la lumière de ces faits, il s’avère impératif de proposer des interventions novatrices visant à intercepter les répercussions de la maltraitance sur les adultes qui en ont vécu, avant qu’elles n’affectent la relation avec leurs enfants. La présente étude vise à évaluer l’efficacité d’un nouveau programme d’accompagnement prénatal à diminuer l’incidence de comportements apeurés et effrayants chez les mères, lorsqu’elles interagissent avec leur bébé de 6 mois. Afin d’examiner l’efficacité du programme, deux groupes de mères provenant de la communauté et présentant une histoire de maltraitance durant l’enfance seront comparés, soit des mères qui auront participé au programme prénatal (n = 35) et d’autres n’en ayant pas bénéficié (n = 35).
Notre équipe a développé ce programme qui constitue, à ce jour, le seul programme à l’intention des femmes exposées à de mauvais traitements durant leur enfance, alors qu’elles sont enceintes. Il a donc une visée réellement préventive. Il a également été conçu afin de soutenir l’adaptation de ces femmes, lors de la transition à la parentalité. Il est composé de neuf rencontres de groupe et il sera offert dans deux sites du Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux de la Mauricie et du Centre-du-Québec à partir de l’automne 2019. Cette étude a plusieurs retombées cliniques potentielles, tant pour les femmes enceintes, que pour leur enfant à naître et les intervenants.