L’acquisition de certains produits ou services, comme des chaussures de sport rares, des propriétés privées convoitées et des vins nature prisés, exige des consommateurs qu’ils déploient des efforts actifs et intentionnels tout en étant conscients de la réelle possibilité d’échouer à trouver le produit qu’ils convoitent. Ce court-circuitage du modèle traditionnel de l’offre et de la demande par les entreprises contribue à l’apparition de dynamiques de marché inédites. Pierre-Yann Dolbec, professeur à l’École de gestion John-Molson de l’Université Concordia, étudie ces dernières.
Pour ce faire, son équipe et lui ont mené des entrevues semi-dirigées avec des personnes qui adoptent ce nouveau comportement de consommation. Plus concrètement, ils ont interrogé pendant une année des participants à des « drops », c’est-à-dire des sorties planifiées de chaussures de sport de marque et série limitées. Cette démarche fastidieuse – plus de 1500 « drops » ont été documentés – a permis de faire émerger un certain nombre de thèmes caractéristiques de la « consommation entrepreneuriale ».
L’analyse démontre que les entreprises transforment leurs pratiques en marketing de manière à créer sciemment une rareté artificielle. Cela a pour effet d’intensifier la concurrence entre les consommateurs pour acquérir les produits ou services concernés, et ce, malgré l’émergence d’une économie de seconde main dédiée pourtant vigoureuse. Afin de tirer leur épingle du jeu, les consommateurs entrepreneuriaux investissent des ressources considérables dans leur quête, s’emploient à identifier, puis à exploiter des opportunités d’achat, et tiennent bon face à l’adversité en dépit des échecs.