Une crise des opioïdes sévit actuellement au Canada et ailleurs dans le monde. Au pays, depuis deux décennies, le nombre de décès dus à ces substances habituellement prescrites pour soulager la douleur ne cesse d’augmenter. C’est pourquoi Vincent Martin, titulaire de la Chaire de recherche en génie microbien et en biologie synthétique de l’Université Concordia, cherche à fabriquer de nouvelles molécules analgésiques semblables à la morphine, à la codéine ou à l’oxycodone, mais dénuées des fâcheux effets secondaires de ces opioïdes.

Le chercheur et son équipe tablent sur Saccharomyces cerevisiae, une levure utilisée couramment pour fabriquer le pain et la bière. Ils en modifient la membrane pour l’amener à produire du stérol animal (cholestérol) plutôt que du stérol fongique (ergostérol). Cette manipulation génétique permet à la levure d’exprimer la classe de récepteurs responsables des effets analgésiques chez l’homme, ou récepteurs couplés aux protéines G. On obtient ainsi un biocapteur d’opioïde à l’allure plus ou moins humaine.

Cette plateforme est capable de détecter la présence d’opiacés dans son milieu. Cela ouvre la porte à la mise au point de molécules analgésiques plus efficaces, voire complètement nouvelles. Le principal avantage de cette approche non traditionnelle est la rapidité. Ainsi, les chercheurs peuvent cribler beaucoup plus d’échantillons de ce biocapteur d’opioïde synthétique que de cellules humaines, lesquelles sont plus complexes à étudier. À long terme, Vincent Martin pense que le biocapteur pourrait contribuer à lutter contre la crise que traverse la santé publique en matière de surdoses et de décès associés aux opioïdes.