L’Amérique latine et les Caraïbes figurent parmi les régions les plus violentes au monde. On y répertorie de 20 à 160 homicides par 100 000 habitants par année, en fonction du pays et de la région, alors que ce taux était de 1,95 au Canada en 2020. En réaction à cette flambée, des partenariats entre États, entreprises et citoyens ont vu le jour, pavant ainsi la voie à des programmes participatifs censés favoriser le développement et la sécurité. Dans les faits, peu de citoyens s’impliquent toutefois dans ces initiatives locales. Tina Hilgers, professeure au Département de science politique de l’Université Concordia, veut savoir pourquoi.
Dans les dernières années, la chercheuse s’est rendue à plusieurs reprises à Vila Floriana (nom fictif), une favela de 100 000 personnes d’une grande métropole du Brésil. À la faveur de ce travail de terrain au long cours, elle a tissé des relations avec de nombreux résidents de cette communauté marginalisée. Au fil de conversations ouvertes tenues sur place, de suivis réalisés à distance par l’entremise de l’application WhatsApp, puis d’entrevues formelles, elle a ainsi pu mieux comprendre les dynamiques qui freinent la participation aux programmes participatifs.
Il se trouve que les lignes d’action des politiciens et des bureaucrates prennent le pas sur les besoins et les demandes des résidents des communautés marginalisées, sapant la participation citoyenne. Par ailleurs, la structure de la communauté, où le pouvoir et les ressources ont tendance à être centralisés dans les mains d’organisations de la société civile, de groupes privés à but lucratif et même de groupes criminels, dissuade les résidents de s’impliquer et perpétue le cycle de l’insécurité. Grâce à ses accès privilégiés, Tina Hilgers favorise désormais la réalisation d’autres recherches scientifiques à caractère social dans les favelas brésiliennes.