Plus du tiers de la population québécoise travaille de nuit. Ces personnes qui, par exemple, pilotent un avion, conduisent une ambulance, combattent les incendies ou veillent sur les malades à l’hôpital mettent ainsi leur santé à risque. Les horaires atypiques peuvent, en effet, causer des troubles du sommeil qui diminuent la productivité, entravent la vigilance et nuisent au métabolisme. Prise de poids, résistance à l’insuline, troubles cardiovasculaires, etc., en résultent souvent. Les perturbations de l’horloge biologique peuvent également provoquer l’apparition de certains cancers. Environ 20 % des personnes qui travaillent de nuit présentent ainsi des problèmes sévères de santé ou d’adaptation qui les obligent à abandonner leur poste.

Les chercheurs et chercheuses du Centre d’études avancées en médecine du sommeil (CÉAMS) du CIUSSS du Nord-de-l’Île-de-Montréal ont conçu de nombreux outils pour aider ces personnes à mieux gérer les effets de leurs horaires de travail. Entre autres, Marie Dumont, professeure au Département de psychiatrie de l’Université de Montréal et membre du CÉAMS, a créé la plateforme Mieux vivre le travail de nuit, gratuite et offerte en ligne sur tablette ou ordinateur. Basés sur plus de 30 années de recherche, les modules interactifs de cet outil permettent d’identifier les obstacles à un bon sommeil et proposent des stratégies pour mieux dormir.

La plateforme est devenue particulièrement populaire pendant la pandémie, tout comme le site internet de la campagne canadienne de santé publique sur le sommeil Dormez là-dessus. Mis sur pied par le Réseau de sommeil et de rythmes circadiens (RSRC), le site est dirigé par Julie Carrier, professeure au Département de psychologie de l’Université de Montréal et chercheuse au CÉAMS. Cela n’a rien d’étonnant : lors d’une enquête réalisée auprès des travailleurs et travailleuses de la santé, les scientifiques du CÉAMS ont relevé des taux élevés d’insomnie (plus du tiers), d’anxiété (45 %) et de symptômes dépressifs (50 %).

La campagne Dormez là-dessus a d’ailleurs connu un tel engouement – 40 000 consultations entre mars et mai 2020 seulement – que les membres du RSRC ont décidé de créer un outil d’intervention cognitivo-comportementale sur l’insomnie, adapté au personnel de la santé ayant des horaires atypiques.