Les traumatismes liés à l’enfance sont plus fréquents qu’on ne le pense. Au Québec, environ le tiers des adultes rapportent avoir vécu un épisode de négligence, d’abus, voire de maltraitance. Les enfants de ces personnes, si elles deviennent parents, sont à leur tour plus à risque d’être exposés à de tels comportements et d’accumuler des retards dans leur développement.

Les traumas ont une forte transmission intergénérationnelle, ce qui explique pourquoi ils occasionnent bon an mal an un fardeau de plusieurs milliards de dollars au Canada. Nicolas Berthelot, professeur au Département des sciences infirmières de l’Université du Québec à Trois-Rivières, cherche à mieux comprendre cette chaîne de transmission dans l’objectif de la casser.

Les traumas ont une forte transmission intergénérationnelle.

Ce titulaire de la Chaire de recherche du Canada en traumas développementaux et ses collaborateurs s’intéressent spécifiquement à la façon dont les parents ayant subi des traumatismes réfléchissent à leur expérience. Leur hypothèse, confirmée : les victimes dotées d’une bonne « mentalisation » du trauma, soit la capacité à comprendre les états mentaux liés à leur histoire personnelle, s’adaptent mieux à la parentalité. Cela constitue un facteur de protection auprès de leurs enfants, avec qui ils développent une meilleure relation d’attachement.

Une telle capacité est tout particulièrement importante lors de l’attente d’un enfant, une des principales fenêtres de vulnérabilité chez les parents ayant vécu des traumas. Nicolas Berthelot et son équipe du Centre d’études interdisciplinaires sur le développement de l’enfant et la famille pensent que des interventions ciblant cette période critique pourraient permettre de corriger les trajectoires de risque.

C’est pourquoi ils ont mis sur pied le projet STEP (Soutenir la Transition et l’Engagement dans la Parentalité), un programme d’accompagnement prénatal destiné aux parents ayant éprouvé des traumas au cours de leur enfance. Le but : aider ces adultes à faire en sorte que leur expérience difficile fasse sens, et ce, dans le cadre d’une série de rencontres de groupe structurées. Jusqu’à maintenant, les résultats du volet pilote sont encourageants : la quinzaine de femmes enceintes participantes ressentent moins de détresse et sont mieux engagées dans leur maternité.

En attendant l’implantation de cette approche novatrice à plus large échelle, les parents québécois ayant subi des traumas sont invités à consulter une série de 19 capsules vidéos produites par les chercheurs et chercheuses. Gratuites, ces dernières visent aussi bien à les sensibiliser à leur expérience de la parentalité qu’à les rediriger vers les ressources d’aide disponibles.