acceptabilite-sociale-donnees-sante 3

Au-delà de l’acceptabilité sociale, ouvrir le dialogue pour favoriser la participation citoyenne au débat sur l’utilisation des données de santé

Par Carole Jabet (Directrice scientifique du FRQS) et Cécile Petitgand (Conseillère spéciale aux données au FRQS)

Ce deuxième article, d’une série de trois, résume les réflexions sur la confiance et l’utilisation des données de santé provenant du colloque 14 du 89e Congrès de l’Acfas, ayant eu lieu le 10 mai 2022 et intitulé Bâtir l’acceptabilité sociale et citoyenne de l’accès et de l’utilisation des données de santé : un colloque en hommage à François Laviolette.

>> Revoir toutes les vidéos du colloque des FRQ sur l’acceptabilité sociale de l’utilisation des données de santé 

Pour bâtir un véritable lien de confiance avec le public, il est nécessaire d’impliquer l’ensemble des parties prenantes, dont les citoyennes et les citoyens, dans la co-construction de l’acceptabilité sociale du partage des données en santé.

Pour la professeure de philosophie de l’Université de Montréal, Ryoa Chung, « on ne peut pas demander à la société civile de faire preuve de confiance aveuglément aux pouvoirs publics ». Il appartient à ceux-ci de montrer qu’ils sont compétents et qu’ils peuvent être dignes de confiance en termes de fiabilité et de transparence, et ce, en tenant des délibérations publiques tout en proscrivant la corruption.

Pour des groupes de travail régionaux

À cet égard, le projet de loi 19 déposé en décembre 2021 et intitulé Loi sur les renseignements de santé et de services sociaux et modifiant diverses dispositions législatives prévoyait la nomination d’un responsable de la protection des données dans les établissements de santé et la création d’un centre provincial pour l’accès aux données aux fins de recherche. Le patient-partenaire Guy Poulin propose d’aller plus loin pour que des citoyennes et des citoyens des régions concernées participent aux prises de décisions dans le centre d’accès grâce à une gouvernance partagée avec les experts et les décideurs publics. En plus d’assurer une plus grande transparence, cette recommandation permettrait d’obtenir de la rétroaction tout au long du processus visant à consolider l’acceptabilité sociale.

Eva Villalba, directrice exécutive de la Coalition Priorité Cancer au Québec, suggère que la co-construction de l’acceptabilité sociale émerge de la mise en place de groupes de travail composés de bénéficiaires des services de santé, du public, et de membres de la communauté de recherche. Pour représenter l’ensemble des régions et de leurs spécificités, les membres de ces groupes de travail devraient provenir d’horizons socio-économiques et socio-démographiques variés. En impliquant ces personnes clés depuis la haute gouvernance jusqu’aux comités de travail régionaux, elles pourraient avoir un effet d’entraînement à travers leurs différents réseaux, ce qui permettrait de favoriser l’acceptation sociale.

Des bonnes pratiques inspirées de la Belgique

Le Québec aurait avantage à s’inspirer de Sciensano, un institut scientifique de santé publique en Belgique, qui applique une approche proactive afin de rejoindre et impliquer les citoyennes et les citoyens.

Cette approche repose sur trois actions complémentaires pour favoriser l’engagement citoyen dans l’acceptabilité sociale du partage des données en santé.

acceptabilite-sociale-donnees-sante 4

Prenant la forme d’un forum citoyen, cette méthode délibérative permet d’engager un panel diversifié de personnes dans un débat où des ressources facilitatrices en déterminent le cadre et des personnes expertes répondent à leurs questions.

Chaque forum est suivi d’un symposium où des recommandations sont formulées pour être ensuite présentées au premier ministre belge et aux différents ministères. Tous participent ainsi à la réflexion visant la mise en place des recommandations retenues dans le système de santé.

C’est notamment le cas d’un groupe de travail intitulé « Genetic Sequencing for Healthy Populations » (Séquençage génétique pour les populations en bonne santé) qui a été mis sur pied avec le mandat d’influencer les procédures de consentement et de remboursement des tests, de même que l’organisation des bases de données.

Une communauté scientifique à mobiliser

Les équipes de recherche de toutes sciences confondues – et particulièrement les universitaires qui bénéficient des fonds publics – doivent continuer de se mobiliser pour mieux communiquer les objectifs de leurs projets de recherche, afin de donner un sens au partage des données en misant sur les bienfaits que les projets apportent pour l’intérêt collectif.

À cet effet, Lyse Langlois, professeure titulaire à l’Université Laval, a évoqué les propos de Daniel Caron selon lesquels « pour que dure l’état d’acceptabilité sociale d’un projet, celle-ci doit avoir été convenue en toute connaissance de cause par l’ensemble des parties, dans un climat d’équité entre les différentes classes d’experts et, surtout, sans condescendance ». Pour ce faire, il nous faut réfléchir à une gouvernance collaborative qui permettrait de maintenir un climat d’équité.

>> Lire le premier article de notre série : Bâtir la confiance autour de l’utilisation des données de santé par une communication claire et transparente

>> Lire le troisième article de notre série : Les voix de la relève étudiante : pour une communication moderne, engageante et d’égal à égal en matière de données

>> Revoir toutes les vidéos du colloque des FRQ sur l’acceptabilité sociale de l’utilisation des données de santé à l’ACFAS