Responsable : 
Michael Nicholson

Établissement : 
Université McGill

Année de concours : 
2020-2021

Table des matières

  1. Résumé du projet

1. Résumé du projet

En cette époque d’événements climatiques sans précédent, de saisons hors-normes, de futurs incertains et de garde-temps numériques, « Calendriers vivants » se tourne aux intuitions d’un âge de chronologies en réécriture, d’horloges battues par les intempéries, et de calendriers révolutionnaires. Mon projet, la première étude des liens entre les histoires environnementales, littéraires, scientifiques et technologiques du temps, démontrera que la conception de la Terre comme horloge et calendrier a elle-même une longue histoire. De 1750 à 1850, des poètes romantiques britanniques de divers milieux développèrent de nouvelles stratégies écologiques d’anachronisme—dans le sens étymologique littéral de ana, contre, et chronos, temps—afin de contester la dominance grandissante de ce que j’appelle le « temps impérial » : la nouvelle forme de temporalité fondée sur les horloges, régulée par les machines, et strictement standardisée, utilisée pour imposer le discours d’un empire allant toujours de l’avant.

Les travaux historiques et historicistes du 17e siècle à aujourd’hui dépeignent l’anachronisme comme signe d’erreur et de sous-développement. « Calendriers vivants » soutient au contraire que l’anachronisme intentionnel est une marque de prescience et de modernité. Toutefois, plutôt que de simplement opposer l’anachronisme à l’histoire, mes recherches ont pour objectif d’historiciser l’anachronisme. L’incorporation de la Worshipful Company of Clockmakers au 17e siècle eut pour effet de discipliner et de standardiser le temps: avant la fin des années 1770, les horloges organisent la vie et le travail, le calendrier se fige, le chronomètre marin gouverne la navigation, et les périodiques circulent quotidiennement. D’ici 1850, ce programme de temps mécanisé est accompli ; Big Ben domine sur Londres, le courrier arrive comme prévu, et l’heure moyenne de Greenwich, qui situera le premier méridien au centre de l’Empire britannique, est adoptée. Les entreprises industrielles et impérialistes de l’époque victorienne insistent que la suprématie économique de la Grande-Bretagne repose sur la manière efficiente avec laquelle l’Empire ordonne son temps.

À la même époque, les écrivains romantiques adoptent la conception de plus en plus obsolète d’un temps agraire. Leurs représentations du chronométrage des cernes d’arbres, d’habitudes migratoires des oiseaux et d’horloges florales sujettes aux conditions météorologiques, catastrophes écologiques et variations régionales anticipent les discussions scientifiques contemporaines concernant les formes non-humaines de temps, de rythme, de connaissance et de calamité. En explorant le recours romantique aux garde-temps écologiques tels que l’horloge botanique ou le coléoptère, mes recherches soutiennent que les idées et l’éthique présentées par ces modèles environnementaux du temps sont tout aussi pertinentes pour le 18e siècle que pour le moment présent.

Par l’entremise d’études de poèmes romantiques et d’un examen archivistique approfondi des naturalistes, horlogers et explorateurs de l’époque, « Calendriers vivants » a pour but d’exposer les origines impériales de la crise climatique à l’aube de l’Anthropocène. Alors que les échéances imposées par le réchauffement planétaire définissent notre époque, mon projet souhaite démontrer comment la perception poétique d’un temps organique et écologique, plutôt que numérique et mécanique, offre de nouvelles manières de comprendre les normes et les attentes temporelles qui donnent forme aux débats contemporains en éthique et politique environnementale.