Peu après le début de l’invasion russe en Ukraine, le groupe Anonymous a déclaré la cyberguerre à la Russie. L’annonce a fait sensation, mais il reste difficile de comprendre comment fonctionne ce groupe né au milieu des années 2000 et d’évaluer son impact.
Francis Fortin, chercheur à l’École de criminologie de l’Université de Montréal, a analysé les actions du groupe dans les médias sociaux pour mieux cerner qui sont ses membres et comment ils agissent. Le projet s’est notamment concentré sur le rôle d’Anonymous pendant le Printemps érable au Québec en 2012. Le groupe avait alors revendiqué des attaques informatiques contre plusieurs sites Internet, dont ceux de l’Assemblée nationale, de la Sécurité publique et du Parti libéral du Québec.
Une analyse des interventions sur des médias sociaux tels Facebook et Twitter montre qu’Anonymous n’est pas hiérarchisé comme le sont généralement les groupes criminels. Il diffère aussi des rassemblements de pirates informatiques, qui réunissent des gens très habiles pour entreprendre des cyberattaques. Anonymous représenterait plutôt un collectif idéologique composé de sous-groupes autonomes.
Certes, un noyau dur de ses membres mène des actions de piratage. Mais quiconque partage les idées du mouvement — axées notamment sur la défense de la liberté d’expression, la préservation de l’environnement et la lutte contre l’autoritarisme — peut participer. Les individus qui s’identifient à Anonymous s’engagent beaucoup plus dans les débats sociaux et les politiques en ligne que dans l’action directe, tel le piratage de sites Internet.
La force d’Anonymous réside dans son impact en ligne et dans les médias traditionnels. Certaines actions spectaculaires servent à attirer l’attention sur ses idées. Cependant, ses sous-groupes se comportent beaucoup plus comme les autres communautés en ligne qui prennent position sur des enjeux politiques et sociaux que comme une organisation criminelle.