La synthèse de nombreux produits d’usage courant implique habituellement le recours à des catalyseurs à base de métaux précieux qui sont réputés toxiques. Au cours des dernières années, l’avènement des biocatalyseurs industriels – des enzymes biodégradables – a changé la donne, car ils offrent l’avantage de simplifier les voies de synthèse et d’éliminer certaines étapes complexes de séparation. Cette grande sélectivité est cependant à double tranchant, car la nature n’a pas toujours de biocatalyseurs adaptés aux réactions chimiques souhaitées.
Joelle Pelletier, professeure au Département de chimie de l’Université de Montréal, cherche donc à améliorer les biocatalyseurs qui existent déjà. Comme ce sont des protéines, ils sont faciles à produire, mais leur complexité les rend difficiles à modifier de manière rationnelle, même par des spécialistes. De fait, le nombre de modifications possibles à tester est pratiquement infini.
Pour résoudre ce problème, la chercheuse et son équipe travaillent à l’élaboration de puissantes simulations informatiques qui permettent de mieux prédire les répercussions des innombrables manipulations d’ADN possibles sur la structure et le mouvement de ces molécules complexes. Cela aura pour effet d’accélérer considérablement leurs travaux, qui reposent sur une enzyme modèle facile à étudier. L’introduction prochaine de l’apprentissage automatique, une branche de l’intelligence artificielle, pourrait augmenter encore davantage le taux de succès de leurs prévisions.
Les enjeux sont considérables, car une diversification de la palette de biocatalyseurs disponibles dans l’industrie signifierait la production de plastiques, d’additifs alimentaires et de produits pharmaceutiques synthétisés de manière durable à partir de ressources renouvelables. On parle donc d’une étape nécessaire dans l’avancée de la société vers l’économie circulaire. En outre, employer ces biocatalyseurs nouveau genre plutôt que leurs vis-à-vis conventionnels sera moins nocif pour la santé humaine, un aspect non négligeable s’il en est.