
Catherine Déri
Postdoctorante, Université du Québec en Outaouais
Publication primée : Comment les personnes étudiantes au doctorat se socialisent-elles au métier de chercheuse et chercheur dans des cafés de rédaction académique?
Publiée dans : Revue Relais
Résumé :
Depuis plusieurs décennies, le taux d’abandon des programmes de doctorat dans les universités canadiennes se situe autour de 50 %, toutes disciplines confondues (OCDE, 2022). Il existe plusieurs raisons incitant les personnes étudiantes à interrompre leurs études, dont le manque d’expériences et de compétences en rédaction académique (Lison et Bourget, 2016). Cette lacune influence négativement l’avancement des projets universitaires, en plus de l’intégration dans un domaine de recherche visé. Puisque les programmes de doctorat n’enseignent pas explicitement la rédaction académique, plusieurs personnes étudiantes cherchent à combler leurs besoins en formation hors de leur université.
Afin d’étudier le problème exposé, nous avons examiné un dispositif d’apprentissage se nommant « cafés de rédaction académique » qui s’inspire du mouvement « Shut up & Write » apparu dans des commerces de San Francisco aux États-Unis en 2007. Les personnes étudiantes utilisent les cafés de rédaction en se donnant rendez-vous sur les médias sociaux pour rédiger ensemble dans des lieux publics (p. ex., cafés, musées, bibliothèques, espaces de cotravail, parcs, etc.). Au sein de ces regroupements, il est possible de développer de meilleures compétences rédactionnelles en observant les habitudes de travail des autres et en échangeant des ressources utiles (Mewburn, Osborne et Caldwell, 2014).
Cet article présente des résultats découlant d’une recherche qui visait à comprendre comment les personnes étudiantes au doctorat se socialisent au métier de chercheuse et chercheur au sein de cafés de rédaction académique. Les données ont été recueillies au moyen d’entrevues individuelles auprès de 25 étudiantes et étudiants provenant de 12 universités au Québec et en Ontario. Dans les cafés de rédaction, les personnes participantes sont exposé.e.s à toutes les facettes du métier de chercheuse et chercheur (recherche, enseignement, administration). De plus, elles développent des compétences rédactionnelles et transversales pour devenir chercheuses ou chercheurs dans différents milieux professionnels (universités, gouvernement, entreprises, organismes à but non lucratif). Dernièrement, elles ont l’occasion de normaliser leurs expériences académiques en bénéficiant du soutien de leurs pairs, entre autres, pour briser le sentiment d’isolement. Somme toute, un apprentissage social se matérialise entre personnes étudiantes au doctorat qui participent à des cafés de rédaction académique pour favoriser leurs parcours universitaires et leurs transitions professionnelles.
En termes de pistes d’action concrètes, les étudiantes et les étudiants devraient être proactifs pour cumuler une diversité d’expériences, en milieu universitaire et dans d’autres contextes de recherche, pour mieux comprendre le métier de chercheuse et chercheur. À titre d’exemple, il existe plusieurs formules de groupes de rédaction académique, alors chaque individu peut choisir le type de regroupement qui lui convient le mieux selon l’avancement de ses études et de ses circonstances particulières. Quant aux responsables de programmes de doctorat, elle.il.s devraient exposer les personnes étudiantes à un éventail d’environnements de recherche, afin de répondre à la diversification des orientations professionnelles à l’intérieur et à l’extérieur du milieu universitaire. Enfin, plusieurs avenues d’exploration sont proposées, incluant l’expérimentation de programmes d’études s’éloignant du doctorat traditionnel, la comparaison de typologies de compétences transversales et l’examen du mentorat entre personnes étudiantes dans des perspectives interdisciplinaires.