Les scientifiques ont longtemps pensé que le code génétique était immuable dans tout le règne vivant. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. De nombreuses recherches ont mis en évidence le fait que la machine cellulaire ne traduit pas toujours l’information génétique de la même façon. L’identification de telles modifications représente toutefois un travail titanesque!

Nadia El-Mabrouk, professeure et chercheuse au Département d’informatique et de recherche opérationnelle de l’Université de Montréal, s’est donc donné la mission de concevoir des méthodes informatiques pour aider les scientifiques à déceler les traductions génétiques « alternatives » survenues au cours de l’évolution pour permettre aux espèces de mieux s’adapter.

La bio-informaticienne et son équipe ont développé CoreTracker, un logiciel qui sert notamment à identifier les changements effectués par la machinerie de transcription (qui copie une séquence d’ADN d’un gène en une molécule appelée « ARN messager ») et de traduction (l’ARN messager est traduit en protéines, les macromolécules responsables du bon fonctionnement de la cellule).

En somme, chaque cellule lit l’information génétique contenue dans sa suite de gènes – le livre de recettes de l’organisme. Chaque gène équivaut à une phase constituée de mots formés de trois lettres appelés « codons », qui sont chacun traduits en un composé organique particulier appelé « acide aminé ». Tous les acides aminés se lient ensuite entre eux pour former des protéines (p. ex., des anticorps ou du collagène).

L’outil CoreTracker utilise des algorithmes — une suite d’instructions devant être exécutées par un ordinateur — pour trouver les codons dont la traduction usuelle a été changée. Ces algorithmes ont été testés sur l’ADN d’espèces de levures et de certains animaux pour lesquels des changements de traduction de codons étaient connus. CoreTracker a atteint un taux de précision et de sensibilité meilleur que les outils habituellement utilisés pour décrypter les autres traductions.

Nadia El-Mabrouk et une équipe de biologistes ont ensuite utilisé CoreTracker pour étudier 51 plantes et algues vertes. Ils ont ainsi découvert 14 nouvelles traductions de codons dans une espèce d’algue.

CoreTracker permet donc de simplifier et de préciser l’identification des mécanismes à l’origine de l’évolution du code génétique d’une espèce, en plus d’apporter une preuve supplémentaire que le code génétique n’est ni fixe ni stable.

Références :