Les vagues de chaleur augmentent les risques de mortalité, en particulier chez les personnes âgées ou malades et chez les enfants en bas âge. L’équipe du professeur Taha Ouarda, de l’Institut national de la recherche scientifique (INRS), a développé un modèle pour mieux anticiper ces périodes dangereuses.
L’Institut national de la santé publique du Québec (INSPQ) estime qu’une vague de chaleur peut causer une hausse de 16 % à 42 % du nombre de décès. Or, la température moyenne et les épisodes de température extrême au Québec continueront d’augmenter en raison des changements climatiques.
Prévoir précisément et longtemps à l’avance les vagues de chaleur et le risque de mortalité qui leur est lié permet aux responsables du système de santé de mieux se préparer, par exemple en menant des campagnes d’information au moment opportun ou en s’assurant de disposer du personnel et de lits suffisants pour répondre à une hausse de la demande.
Les modèles d’alerte existants sont basés sur des données qui ne tiennent pas compte des changements climatiques. « Nous avons donc d’abord développé un outil qui modélise l’impact des changements climatiques sur la durée, l’intensité et la fréquence des vagues de chaleur », explique le professeur Ouarda.
Son équipe s’est ensuite penchée sur le fait que la variabilité de ces épisodes de fortes chaleurs dépendait aussi de certains indices d’oscillations climatiques. Le professeur donne l’exemple d’El Niño : pendant cet événement climatique, la surface de l’océan Pacifique tropical se réchauffe plus que d’habitude, ce qui fait grimper le mercure chez nous. L’équipe a ajouté ces éléments de variabilité à ses modélisations des vagues de chaleur.
Le lien avec la mortalité
« Puisque nous savions que les vagues de chaleur ont un impact sur la mortalité et que les changements climatiques et les indices climatiques produisent un effet sur ces vagues de chaleur, nous avons développé un modèle qui relie directement les changements et les indices climatiques à la mortalité », explique Taha Ouarda.
Le nouvel outil sert donc à prédire les vagues de chaleur, mais surtout les risques de mortalité. L’un de ses grands avantages est d’émettre des alertes plusieurs mois à l’avance, ce dont les responsables de la planification des services de santé peuvent bénéficier énormément. L’autre avantage est que le modèle offre plus d’information (durée, intensité et fréquence des vagues de chaleur) et avec plus de précision. Le chercheur et son équipe l’ont mis au point pour la Communauté métropolitaine de Montréal et la Communauté métropolitaine de Québec.
« Ce sont des modèles qui s’appliquent localement, en fonction de caractéristiques différentes dans chaque région, telles la température moyenne et la composition démographique comme l’âge moyen, l’indice de défavorisation ou le nombre d’enfants », précise le chercheur.
Un effort multidisciplinaire
Pour développer son outil, l’équipe a dû surmonter certains défis. Ainsi, les données de santé sont difficiles à obtenir et elles sont toujours anonymisées. C’est le contraire du côté des changements et des indices climatiques, où c’est l’abondance de variables qui pose problème. L’équipe a donc misé sur celles qui avaient le plus d’impact sur les prédictions, quitte à en laisser d’autres de côté.
Des membres de plusieurs disciplines ont participé à cet effort de modélisation, des sciences de la nature au génie en passant par la santé et les sciences sociales. L’équipe souhaite maintenant raffiner l’outil pour qu’il puisse effectuer des prédictions de plus en plus ciblées, par exemple pour des quartiers plutôt que pour une région métropolitaine, afin de tenir compte des risques différents (îlots de chaleur, population plus âgée ou plus pauvre, etc.).
Puisque nous savions que les vagues de chaleur ont un impact sur la mortalité et que les changements climatiques et les indices climatiques produisent un effet sur ces vagues de chaleur, nous avons développé un modèle qui relie directement les changements et les indices climatiques à la mortalité.
Quelques chiffres clés :
16 % à 42 %
Estimation en pourcentage de la hausse du nombre de décès qu'une vague de chaleur peut causer.
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Masselot, Pierre & Ouarda, Taha & Charron, Christian & Campagna, Céline & Lavigne, Eric & St-Hilaire, André & Chebana, Fateh & Valois, Pierre & Gosselin, Pierre. (2022). Heat-related mortality prediction using low-frequency climate oscillation indices: Case studies of the cities of Montréal and Québec, Canada. Environmental Epidemiology. 6. e206. 10.1097/EE9.0000000000000206.
Chaleur, INSPQ
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