Un lien entre la chirurgie bariatrique et le cerveau ? Les perturbateurs endocriniens au banc des accusés

1. RÉSUMÉ DU PROJET

Le succès thérapeutique de la chirurgie bariatrique peut être défini comme l’obtention d’une perte de poids stable et satisfaisante avec une amélioration significative de la qualité de vie du patient. Mais pour atteindre cet objectif, la santé psychologique du patient est cruciale, car les processus émotionnels, motivationnels et cognitifs sont des régulateurs clés des comportements. Hélas, ces facteurs sont négligés dans les procédures post-chirurgicales actuelles. Il est de la plus haute importance de les considérer, car la perte de poids massive et rapide peut favoriser la libération de polluants organiques persistants (POP) stockés dans les tissus adipeux. Une fois dans l’organisme, ces composés chimiques peuvent altérer les fonctions cérébrales et ainsi compromettre le succès de la chirurgie bariatrique.

Le but de ce projet multidisciplinaire est d’apporter un nouvel éclairage quant aux facteurs de risque touchant la santé psychologique et cognitive postopératoire, et ainsi transformer la prise en charge du patient bariatrique. Les objectifs sont :  1) Mesurer l’exposition aux POP à l’aide d’une méthode de détection novatrice via des échantillons de cheveux; 2) Évaluer le profil affectif, motivationnel et cognitif à partir de questionnaires standardisés et des tests neuropsychologiques en ligne; 3) Déterminer si les effets des POP sur le fonctionnement cérébral sont médiés par des perturbations métaboliques et endocriniennes; 4) Apporter de nouvelles connaissances sans alourdir le fardeau des patients via des approches méthodologiques d’avant-garde.

Quatre-vingts patients (40 hommes et 40 femmes, âgés de 40 à 60 ans) en attente d’une gastrectomie verticale (sleeve) seront recrutés. Les critères d’exclusion seront la présence de troubles neurologiques, psychiatriques, endocriniens (autres que le diabète de type 2) ou d’une dépendance à des stupéfiants ou à l’alcool. Le profil nutritionnel, les habitudes de vie, les caractéristiques sociodémographiques et anthropométriques ainsi que des prélèvements sanguins seront obtenus lors du bilan préopératoire (1-2 mois avant la chirurgie) et des suivis postopératoires (3, 6 et 12 mois). Les variables d’intérêt sont : 1) les concentrations capillaires de POP (BPC, pesticides, ignifugeants halogénés), et d’hormones (stéroïdiennes, corticostéroïdes et thyroïdiennes), 3) le profil affectif/motivationnel (p. ex. régulation émotionnelle, anxiété/dépression, satisfaction personnelle), le profil cognitif (p. ex. vitesse de traitement, contrôle de l’inhibition, prise de décision) et 4) les profils métaboliques et inflammatoires. Selon un devis pré/post-intervention, des modèles statistiques de régression multiniveaux permettront de quantifier les changements des mesures entre le niveau de base (bilan préopératoire) et les suivis à 3, 6 et 12 mois et de déterminer la contribution de chaque facteur.

Ce projet fera appel à six experts issus de divers disciplines et secteurs. Ce regroupement de chercheurs et de cliniciens Québec-Luxembourg provenant de différents milieux s’inscrit dans une véritable démarche de coconstruction du savoir pour permettre une synergie de recherche qui va au-delà du cadre (inter)disciplinaire et des collaborations traditionnelles. À l’ère de la médecine personnalisée, l’identification du profil d’exposition aux POP de chaque patient et de ses conséquences sur la santé physiologique et psychologique permettra d’adapter les interventions et de raffiner le pronostic.

Appel à propositions