Cette recherche vise à comparer quatre types de logements à loyer modique subventionnés à 25 % du revenu des ménages (HLM, OSBL COOP, PSL sur le marché privé) sur le plan des contextes, des mécanismes d’action et des effets sur les parcours de vie et les capabilités des locataires.
2. MÉTHODE UTILISÉE
Au total, 60 locataires ont accordé un entretien individuel de type « récit de vie », soit 15 par types de tenure. L’échantillon comporte 35 femmes (58 %) et 25 hommes (42 %) et l’âge moyen est de 48 ans (min = 18 ; max = 70). La majorité (53 %) des locataires sont des personnes seules, tandis que 45 % vivent avec des enfants. Les locataires de Montréal sont surreprésentés dans l’échantillon (68 %).
3. RÉSULTATS
L’accès à un logement à loyer modique a un effet variable sur le parcours des individus. Plusieurs améliorent substantiellement leurs conditions de vie, alors que pour d’autres le logement à loyer modique ne semble pas opérer de changement notoire au-delà de l’apaisement des difficultés liées à l’instabilité résidentielle. Il arrive parfois que le logement ajoute de nouvelles menaces (ex. infestations, conflits), de sorte que la personne doit mobiliser énormément de temps et d’énergie pour y faire face, ce qui limite de manière importante les effets bénéfiques du logement à loyer modique.
Neuf mécanismes d’action du logement à loyer modique ont été identifiés : 1) allégement financier; 2) sécurité d’occupation; 3) structures formelles de participation; 4) sociabilité locale; 5) soutien d’intervenant.e.s; 6) salubrité; 7) qualité de l’environnement bâti; 8) proximité des services; 9) relations avec les gestionnaires/propriétaires. Les tenures varient dans leur capacité à activer les mécanismes et, conséquemment, dans les effets qu’ils peuvent produire.
Le logement à loyer modique peut avoir plusieurs impacts positifs : 1) acquisition de ressources/capacités; 2) opportunités nouvelles; 3) démarches de résolution de problèmes; 4) investissement dans sa santé; 5) protection des acquis; 6) bien-être et sentiment de sécurité; 7) conditions matérielles. Des impacts négatifs sont aussi possibles : 1) fréquence des conflits; 2) sentiment d’insécurité et de stress; 3) pertes de liens sociaux; 4) détérioration de sa santé.
Plusieurs différences sont observées entre les tenures. À titre d’exemple, en HLM, on constate que les structures formelles de participation sont très bénéfiques, mais que les problèmes d’infestations affectent très négativement la vie de certains locataires. Les OSBL permanents offre un contexte similaire à celui des HLM, mais sans les structures formelles de participation. Les OSBL transitoires offrent un soutien précieux aux personnes en grand besoin par le biais d’intervenant.e.s sur place, mais les locataires s’inquiètent de la fin de leur bail de 3 ou 5 ans. La COOP donne du pouvoir aux locataires qui apprécient son mode de vie coopératif, mais son accessibilité est complexe et on y rapporte des effets de clique et des rapports inégalitaires entre locataires. Enfin, le PSL sur le marché privé ne présente pas la même sécurité d’occupation que les autres tenures et s’accompagne souvent de craintes et d’impuissance.
4. RECOMMANDATIONS
1) Préserver la diversité des logements sociaux (HLM, COOP, OBNL) à but non lucratif; 2) Augmenter les investissements pour rénover et entretenir le parc de logements sociaux existant (incluant la prévention et la gestion des infestations); 3) Rehausser le financement du soutien communautaire en logement social; 4) Améliorer les services offerts, la communication et la collaboration avec le réseau de la santé; 5) S’assurer que les locataires qui ont un PSL sur le marché privé soient accompagnés et protégés.
Chercheuse principale
Janie Houle, Université du Québec à Montréal
Dépôt du rapport de recherche : septembre 2023