Au Québec, chaque année, environ 20 000 personnes subissent un accident vasculaire cérébral (AVC). Près de 90 % de ces AVC sont causés par un caillot de sang qui bloque les vaisseaux sanguins cérébraux et, conséquemment, l’apport en oxygène et en nutriments vers le cerveau. Privées d’oxygène, quelque 1,9 million de cellules nerveuses meurent chaque minute après un AVC.
Si aucun traitement ne permet de restaurer les fonctions cérébrales perdues, il existe une approche thérapeutique pour limiter les dégâts. Il s’agit d’injecter un agent thrombolytique qui dissout le caillot et rétablit le flux sanguin. Ce traitement doit être donné dans un délai de 4,5 heures suivant l’AVC, après quoi le risque d’hémorragie augmente. Malheureusement, selon le ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec, 66 % des victimes d’AVC n’arrivent pas à temps à l’hôpital pour recevoir le médicament. Résultat : quelque 3 000 décès annuellement et 130 000 personnes vivant avec des séquelles physiques et psychologiques.
L’équipe de Ayman ElAli, professeur agrégé à la Faculté de médecine de l’Université Laval, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en interactions neurovasculaires moléculaires et cellulaires et chercheur au Centre de recherche du CHU de Québec-Université Laval, a toutefois identifié une stratégie qui diminuerait les risques d’hémorragie associés à l’agent thrombolytique.
En utilisant un modèle animal d’AVC, ces scientifiques ont découvert qu’un AVC dérègle un mécanisme moléculaire responsable de maintenir l’intégrité des vaisseaux sanguins. Ils ont donc administré, 1,5 heure après la fenêtre thérapeutique approuvée, l’agent thrombolytique à des animaux ayant subi un AVC. D’autres animaux ont reçu en parallèle une molécule qui rétablit le mécanisme de protection des vaisseaux sanguins. Les animaux du premier groupe ont fait des hémorragies cérébrales, alors que chez ceux du deuxième groupe, les vaisseaux sanguins ont été protégés, limitant la mort des cellules nerveuses après AVC.
Selon cette expérience, il serait possible d’administrer l’agent thrombolytique au-delà de la fenêtre de 4,5 heures si on réactive en même temps le mécanisme de protection vasculaire.
M. ElAli collaborera prochainement avec une compagnie biopharmaceutique aux États-Unis pour tester une molécule utilisable en clinique. Si le tout s’avère concluant, les médecins disposeraient d’un outil complémentaire pour améliorer l’efficacité et la sécurité de l’agent thrombolytique, ce qui permettrait de sauver des milliers de vies. Cette approche pourrait aussi être utilisée dans d’autres maladies neurodégénératives, comme la maladie d’Alzheimer, où l’aspect vasculaire est central.