L’Assemblée nationale du Québec a adopté à l’unanimité la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale le 13 décembre 2002.
Plus de dix ans après son adoption, la lutte à la pauvreté emporte d’adhésion d’une très large majorité des Québécois, qui se montrent par ailleurs préoccupés par l’augmentation de la pauvreté et, encore davantage, par la hausse des inégalités, comme le révèle l’Enquête Représentation sociale des inégalités et de la pauvreté.
Les Québécois estiment en majorité vivre dans une société plutôt juste.
Une large majorité de Québécois – deux personnes sur trois – estime que le taux de pauvreté est en augmentation au Québec depuis cinq ans. Le pessimisme exprimé par cette opinion est plus prononcé chez les femmes que chez les hommes. La représentation sociale de la pauvreté est fortement différenciée selon les milieux sociaux. Le pessimisme est plus marqué en milieu ouvrier et parmi les personnels des services ou dans les ménages à bas revenus. La connaissance d’une personne pauvre entraine une attitude davantage positive envers la pauvreté et une baisse des idées reçues à connotation négative. Par contre, les personnes en situation plus favorisée (professions à statut social élevé et revenus largement au-dessus de la moyenne) sont nettement moins pessimistes sur l’étendue de la pauvreté.
Il existe un accord plus marqué au sein des diverses catégories sociales sur le fait que les inégalités socioéconomiques sont en hausse. L’inquiétude est ressentie de manière plus large et moins dépendante des situations personnelles vécues.
S’ils expriment des inquiétudes sur la pauvreté et les inégalités, les Québécois estiment par contre en majorité vivre dans une société « plutôt juste ». Ce sentiment de justice exprimé à l’échelle de toute la société – nommé sentiment de macrojustice – est cependant ressenti de manière plus pessimiste chez les femmes, les jeunes et les anglophones. L’enquête a aussi mesuré le sentiment de microjustice, soit la justice ressentie à l’égard de la situation personnelle des enquêtés, et celle-ci apparaît nettement dépendante de la situation personnelle de ces enquêtés.
Il existe au Québec un très large consensus sur l’idée que, pour qu’une société soit juste, la couverture des besoins fondamentaux – en matière de logement, de nourriture, d’habillement, de santé, d’éducation – doit être assurée pour tous ses membres. Cette idée emporte l’adhésion de plus de 90 % des enquêtés. Ce résultat empirique est important, car il sert d’indicateur d’un large accord sur le fait que la société doit optimiser le sort de ses membres les plus défavorisés.
Ce résultat empirique donne à penser que le volet social qui est au cœur de ce qu’on appelle souvent « le modèle québécois » n’est pas contesté par une majorité de la population. La redistribution des revenus par l’État et la couverture des besoins sociaux de base ne sont pas remises en question d’après les données de cette enquête.
Chercheur principal
Simon Langlois, Université Laval
Dépôt du rapport de recherche : novembre 2015